Les mégots, principale pollution des océans

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“Plus que les sacs plastiques ou les pailles, ce sont les mégots de cigarettes qui pollueraient le plus les océans.

Coup de tonnerre ce mardi 28 août, le ministre de la Transition écologique Nicolas Hulot a annoncé quitter le gouvernement. Après avoir accusé le “modèle économique, marchand” d’être “la cause de tous ces problèmes [écologiques]”, le désormais ex-ministre de l’Écologie a pointé du doigt “la responsabilité collective, sociétale”. Nicolas Hulot a notamment fustigé le manque de conscience écologique, citant notamment ces “petits gestes élémentaires” qui peuvent paraître “totalement dérisoires”, mais qui font la différence. “Quand je vois qu’on continue à jeter les mégots par terre…”, s’est-il indigné.

Ses propos précis font justement écho à une vaste enquête publiée par NBC News lundi 27. Elle dénonce la pollution des océans par les filtres des cigarettes. Car si la lutte pour protéger les océans s’est concentrée – à juste titre- sur la pollution des sacs, ustensiles de cuisine et plus récemment des pailles en plastiques, la “menace numéro 1 demeure le mégot de cigarette, le polluant le plus néfaste aux océans”, insiste le média américain.

Non seulement les filtres de cigarettes sont légions, mais leur élimination n’est pas réglementée à l’échelle de la planète. En conséquence, une grande partie finit dans les mers et océans. Des scientifiques, universitaires, activistes écologiques et politiques se sont donc regroupés au sein de la Cigarette Butt Pollution Projet, une société à but non-lucratif qui tente de recentrer le combat pour s’attaquer à ce problème. Leur objectif : faire interdire les filtres à cigarettes aux États-Unis, et partout ailleurs dans le monde.

5 600 milliards de mégots

Et pour cause, les filtres à cigarettes se dégradent très lentement – un à deux ans en moyenne. Et l’un de ses composants, l’acétate de cellulose, est un plastique qui met plus de dix ans à se décomposer. Selon la Cigarette Butt Pollution Projet, la majorité des 5 600 milliards de cigarettes fabriquées chaque année sont dotés de ces filtres, et les deux tiers finissent dans la nature. Si l’on ajoute à cela le fait qu’un seul mégot peut polluer jusqu’à 500 litres d’eau, l’ampleur du désastre est évidente. Autre exemple glaçant, ces 32 dernières années, 32 millions de mégots ont été ramassés sur les plages du monde, en faisant le détritus le plus répandu.

En France, ce sont entre 30 et 40 milliards de mégots qui sont jetés chaque année – un millier par seconde environ – dont plus de 40% se retrouveraient dans la nature, rappelait le ministère de la Transition écologique en juin dernier. Si différentes solutions ont été évoquées, comme une “éco-contribution” visant les fabricants de cigarettes et servant à payer la dépollution et le ramassage, le besoin d’une prise de conscience collective est également nécessaire, comme le soulignait Nicolas Hulot ce mardi matin.

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Pour ne rien gâcher, les mégots sont très difficilement recyclables. Bourrés de substances chimiques (près de 4000) dont une cinquantaine sont réellement toxiques, comme la nicotine, les mégots doivent être “dépollués” avant de pouvoir être recyclés. En France, quelques entreprises tentent de s’attaquer au problème, comme ÉcoMégot à Bordeaux ou MéGo, dans le Finistère, qui a déjà recyclé plus de quatre tonnes de mégots (10 millions de filtres) grâce à un processus de broyage et de lavement dans des bains d’eau en circuit fermé. Un “petit geste”, néanmoins très loin d’être suffisant au niveau mondial.

Le filtre, “un outil marketing sans avantage pour la santé”

À NBC News, Thomas Novotny, professeur de santé publique à l’Université d’État de San Diego (États-Unis), déclare que de toute façon, “il est presque certain que les filtres ne présentent aucun avantage pour la santé, qu’ils ne sont qu’un outil marketing [des fabricants de cigarettes] permettant de fumer plus facilement. C’est en revanche un polluant notoire”.

Jusqu’ici, les tentatives du Cigarette Butt Pollution Projet de faire adopter une loi interdisant les filtres ont échoué. En cause, selon eux, le très puissant lobby du tabac aux États-Unis qui financent massivement les campagnes des politiques. Ce matin sur France Inter, Nicolas Hulot dénonçait lui aussi l’action des lobbies qui entrave la mise en place de véritables politiques écologiques, pourtant cruciales à la préservation de notre planète. Pour tenter d’y parvenir, l’un des “petits gestes élémentaires” à accomplir : ne plus jeter ses mégots par terre.”

Ecrit par Victor Garcia pour l’Express

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